Le dossier du mois

Impôt sur le revenu 2016 : maîtriser sa déclaration de revenus 2015

Les déclarations papier vont être adressées aux contribuables courant avril 2016 et le service de déclaration en ligne sera alors ouvert. Compte tenu des réformes adoptées dans la loi de finances pour 2016, notre dossier du mois présente l’essentiel de ce qu’il faut savoir sur la déclaration 2016 des revenus 2015. Le site www.service-public.fr fournit également une aide très précieuse. Les contribuables ont reçu les éléments de leur déclaration d’impôt. Il ne faut toutefois pas céder à la facilité en validant trop rapidement les éléments fournis par l’Administration. D’une part, des erreurs ou des omissions peuvent se glisser dans les chiffres collectés par l’Administration auprès des employeurs, des établissements financiers… D’autre part, il appartient au contribuable de n’oublier aucune charge et de prendre les décisions qui lui sont favorables dans le strict respect de la loi fiscale. Notre dossier fait le point.
1 – Les changements dont il faut tenir compte : les nouveautés de la déclaration 2016 / revenus 2015
La déclaration et le paiement de l’impôt par Internet deviennent peu à peu obligatoires
En vue de la mise en place du prélèvement à la source de l’IR, annoncée par les pouvoirs publics pour 2018, la loi de finances pour 2016 prévoit une généralisation progressive de l’obligation de déclarer ses revenus par Internet et de payer ses impôts par voie dématérialisée. Pour la déclaration de revenus 2015, souscrite en 2016, la télé-déclaration sera ainsi obligatoire pour les contribuables ayant perçu, au titre des revenus 2014, un revenu fiscal de référence supérieur à 40 000 €, la non-déclaration par Internet entraînant une amende de 15 € par déclaration et annexe. Concernant les paiements des acomptes d’IR ou de solde, ils devront être effectués par voie dématérialisée à compter du 1er janvier 2016 lorsque leur montant excède 10 000 €. Ce seuil sera peu à peu abaissé les années suivantes.

La fiscalité des ménages en 2016 : revalorisation des barèmes et seuils
Comme pour les revenus 2014, le barème de l’impôt sur le revenu est actualisé et revalorisé du montant de l’inflation constatée en 2015, à savoir 0,1 %. Le plafond du quotient familial était passé à 2 000 € dans la loi de finances pour 2013 (revenus 2012), à 1 500 € pour l’imposition des revenus 2013 et à 1 508 € en 2015 pour l’imposition des revenus 2014. Il est fixé à 1 510 € pour les revenus 2015, imposables en 2016. Les pensions alimentaires versées aux enfants majeurs sont déductibles du revenu imposable dans la limite de 5 732 € pour les revenus 2015. La fiscalisation des majorations de pensions pour les retraités ainsi que celle des complémentaires Santé sont imposables depuis 2014.
La modification des incitations fiscales ("les niches fiscales")
Le plafond des niches fiscales est maintenu pour l’imposition des revenus de 2015 à 10 000 €. Toutefois, les souscriptions pour le cinéma (Sofica) et les investissements outre- mer permettent de porter ce plafond à 18 000 €. Le dispositif Pinel en faveur de l’investissement locatif dans le secteur intermédiaire est maintenu jusqu’au 31 décembre 2016 avec la possibilité, depuis le 1er janvier 2015, de louer à des ascendants ou descendants. Les avantages liés aux investissements dans les PME se poursuivent jusqu’au 31 décembre 2016, de même que l’investissement dans des locations meublées non professionnelles. Les travaux dans l’habitation principale donnent droit à un Crédit d’Impôt pour la Transition Energétique (CITE). Celui-ci est prorogé et fait l’objet de quelques aménagements. Certains travaux nécessitent ainsi d’être réalisés par une entreprise agréée RGE et le logement doit faire l’objet d’une visite préalable obligatoire par l’entreprise afin de s’assurer de l’adéquation des travaux envisagés au logement considéré.
L’imposition des plus-values de cession de valeurs mobilières
Le régime des plus-values de cession de valeurs mobilières et droits sociaux a été réformé en 2013. Le principe d'imposition au barème progressif ne comporte plus d'exception et les plus-values font l’objet d’un abattement pour durée de détention. Un abattement renforcé existe dans certaines situations. La plus-value imposable de 2015 est égale à la somme des gains diminuée des pertes, l’abattement pour durée de détention devant être appliqué à la plus-value nette et non aux plus-values et aux moins-values. Le contribuable peut choisir la plus-value sur laquelle s’impute la moins-value réalisée. Les moins-values réalisées au cours des dix dernières années et non imputées peuvent être déduites de la plus-value de 2015. En cas de moins-value en 2015, cette moins-value est reportable sur les dix années suivantes. La plus-value nette est diminuée d’un abattement de 50 % après deux années de détention et de 65 % après huit ans de détention. Cet abattement s’applique à l’ensemble des gains nets de cession d’actions, de parts de société, de droits portant sur ces titres ou de titres représentatifs de ces mêmes actions (Sicav, CCP, FCP...). Un abattement incitatif pour durée de détention a été créé en 2013 : l’abattement proportionnel majoré est destiné à encourager la création d'entreprises et la prise de risques. Il s’agit d’un abattement proportionnel de 50 % pour la plus-value sur les titres faisant l’objet d’une à quatre années de détention, de 65 % pour des titres détenus au moins quatre ans et moins de huit ans à la date de cession et d’un abattement de 85 % pour des titres détenus depuis au moins huit ans. Aucun abattement ne s’applique en revanche pour calculer les prélèvements sociaux
La fiscalité des revenus du capital et le financement participatif
Les revenus du capital ont perdu le bénéfice des prélèvements forfaitaires et sont soumis au barème de l’impôt sur le revenu depuis les revenus de 2013. Le prélèvement forfaitaire sur les dividendes s’établit à 21 % et sert d’acompte à l’impôt sur le revenu effectivement dû. Un mécanisme identique existe pour les intérêts et placements à revenu fixe avec un taux de 24 %. Les plateformes de financement participatif (« crowdfunding ») se développent sur Internet et les pouvoirs publics s’y intéressent…. En effet, L’ordonnance n° 2014-559 du 30 mai 2014 suivie du décret n° 2014 1053 du 16 septembre 2014 ont rendu possible le financement participatif depuis le 1er octobre 2014. Il s’agit d’un mode de financement alternatif faisant appel à la contribution financière des particuliers, qui peut prendre la forme de dons, de souscription au capital de sociétés ou de prêts avec ou sans intérêts, sachant que pour les avances, les prêts avec intérêts sont limités à 1000 € par projet et par prêteur tandis que les prêts sans intérêt sont limités à 4 000 € par projet et par prêteur. Jusqu’à présent, aucun dispositif ne permettait de déduire fiscalement une éventuelle perte des fonds avancés ou investis en capital. La loi de finances rectificative pour 2015 prévoit dans son article 25, que pour les prêts participatifs consentis à compter du 1er janvier 2016, en cas de non remboursement le contribuable peut imputer la perte en capital subie, à compter de l’année au cours de laquelle la créance devient irrécouvrable, sur les intérêts générés par des prêts consentis dans les mêmes conditions et perçus au cours de la même année ou des cinq années suivantes. Attention en revanche car cette imputation n’est possible que pour calculer l’impôt sur le revenu, pas pour déterminer le montant des prélèvements sociaux qui seront dus sur les intérêts perçus.
2 - Les règles à suivre
Vérifier et compléter
La déclaration pré-remplie par l’Administration doit être vérifiée avec soin et rectifiée éventuellement. Toutes les modifications dans la situation de famille doivent être signalées car elles ont une incidence sur le montant de l’imposition. Les cases vides doivent être complétées, notamment en ce qui concerne les revenus que l’Administration ne connaît pas (revenus fonciers, plus-values sur valeurs mobilières…). Le contribuable doit également mentionner toutes les charges qui donnent lieu à réduction d’impôt ou à crédit d’impôt.
Profiter des exonérations de salaires
Les salaires des apprentis sont exonérés d’impôt jusqu'à 17 490 €. Il en est de même, sous certaines conditions, pour les indemnités versées dans le cadre d’un stage aux enfants étudiants, en application de la loi sur l'encadrement des stages de juillet 2014. Les étudiants qui ont exercé une activité salariée peuvent ainsi, sous certaines conditions, être exonérés à hauteur de 17 490 € en 2015. L’Administration ne saurait procéder à ces décisions et c’est au contribuable qu’il appartient de faire les bons choix.
Cocher les bonnes cases
Comme le soulignent avec pertinence les experts d’Intérêts Privés, « cocher une case spécifique est parfois indispensable pour que la situation soit prise en compte par le fisc…. Par exemple, pour pouvoir bénéficier de la demi-part supplémentaire pour parent isolé, penser à cocher la bonne case en page 2 de la déclaration 2042 ».
Déduire les dons et pensions
Les contribuables qui sont séparés et qui versent une pension alimentaire peuvent déduire cette pension. Lorsque les enfants sont mineurs, la déduction peut être totale. Lorsqu’ils sont majeurs, le montant de la déduction est plafonné. Il ne faudra pas oublier la déduction éventuelle des dépenses de garde d’enfant et de scolarité. Il faudra vérifier aussi que l’administration fiscale applique le bon statut (parent isolé ou qui élève seul un enfant).
Conserver les justificatifs
Il n’est plus obligatoire de joindre à la déclaration les justificatifs pour les dépenses qui donnent droit à une réduction d’impôt. Toutefois, il faut conserver ses justificatifs pour répondre aux interrogations éventuelles de l’Administration. Le droit de rectification de l’Administration pour l’impôt sur le revenu 2016 sur les revenus de 2015 expirera le 31 décembre 2018.
3 - Les décisions à prendre
Faire les bons choix : rattacher un enfant majeur
Les contribuables sont les maîtres de certains choix. C’est ainsi que des couples peuvent décider de rattacher à leur foyer fiscal un enfant majeur qui effectue des études ou prévoir une imposition distincte pour lui. La décision dépendra d’un certain nombre de facteurs. Généralement, si l’enfant n’a pas de revenu propre, le rattachement est la meilleure solution… en particulier, soulignent les experts, pour les parents isolés qui bénéficient d’une part entière de quotient familial pour le premier enfant à charge et pour les parents ayant trois enfants et plus (le troisième enfant ouvre droit à une part entière plafonnée).
Faut-il opter pour l’évaluation réelle des frais professionnels ?

Les contribuables ont souvent le sentiment que le régime d’évaluation forfaitaire des frais professionnels, qui est celui de la majorité des salariés, ne leur est pas favorable. L’abattement forfaitaire de 10 % peut être insuffisant en comparaison des dépenses effectuées par obligation professionnelle et contraintes familiales, financières ou sociales : transport, double résidence, mutations géographiques fréquentes… Il est possible de demander la déduction du montant réel des dépenses professionnelles si ce montant est supérieur à celui de la déduction forfaitaire de 10 %. Cette possibilité concerne les frais de transport, mais également les frais de repas et certains frais particuliers (vêtements professionnels spéciaux, dépenses de déménagement en cas de changement de résidence nécessité par un nouvel emploi).
Les calculs devront être effectués avec rigueur et en suivant les instructions et barèmes administratifs (www.impots.gouv.fr). Si l'on doit supporter des frais de transport pour se rendre de son domicile à son lieu de travail, ces frais sont déductibles ; cependant :

• lorsque la distance entre le domicile et le lieu de travail n'excède pas 40 km, on peut déduire le montant des frais réels, à condition d'en justifier,
• lorsque cette distance est supérieure, la déduction est admise dans les mêmes conditions pour les 40 premiers kilomètres, et, pour le surplus, il faut être en mesure de justifier de l'éloignement entre le domicile et le lieu de travail par des circonstances particulières liées notamment à l'emploi, permettant ainsi une prise en compte complète de ces frais.

Le contribuable peut, pour l’évaluation de ses frais, utiliser le barème kilométrique qui a été plafonné cette année à 7 CV. Ce barème prend en compte l’ensemble des dépenses directement liées au véhicule utilisé, à l’exception des frais de garage. Les salariés qui sont locataires de leur véhicule et qui souhaitent déduire leurs frais professionnels pour leur montant réel peuvent utiliser un barème de frais de carburants. En pratique, il suffit d'indiquer le montant des frais sur la déclaration de revenus (code "frais réels" dans la rubrique "Traitements et salaires"). On ne peut pas bénéficier, à la fois, de la déduction forfaitaire de 10 % et de la déduction des frais réels. L'option s'applique à l'ensemble des revenus imposables dans la catégorie des traitements et salaires perçus. L’option peut être différente pour chacun des déclarants. Il faut signaler que la déduction de 10 % du salaire imposable est plafonnée à 12 170 €.

La déduction des frais de repas
Lorsque l'activité professionnelle oblige le contribuable à prendre certains repas hors de chez lui et à supporter effectivement des frais supplémentaires, les frais sont déductibles. En cas de justifications complètes et précises, le montant des frais supplémentaires est égal à la différence entre le prix payé et la valeur du repas pris au foyer. Ce dernier est évalué à 4,65 € pour 2015. Le seuil au-delà duquel la dépense est considérée comme exagérée s’établit à 18,10 € pour 2015, soit une déduction maximale de 13,45 € par repas en 2015.
La déduction des dépenses de dépendance
Ceux qui vivent dans un établissement pour personnes âgées dépendantes (ou équivalent), peuvent bénéficier d’une réduction d’impôt pour les frais liés à la dépendance et à l’hébergement. Elle est égale à 25 % des frais engagés après déduction éventuelle de l’APA, et ce dans la limite de 10 000 € par an et par personne hébergée. Lorsque les enfants aident leurs parents, ils peuvent déduire le montant de leur aide au titre de la pension alimentaire.
Profiter des incitations et avantages fiscaux

Pour réduire ses impôts, il faut faire les bons choix dans ses placements et privilégier ceux qui permettent de bénéficier d’exonérations fiscales ou de réductions d’impôt. L'Etat souhaite souvent inciter les contribuables à agir dans telle ou telle direction : faire des dons à des associations d'aide ("dons aux œuvres"), investir dans les forêts pour reconstituer notre environnement, aider les créations d'entreprises ("investissement de proximité”), le cinéma (Sofica), rénover et développer l'immobilier d'habitation (travaux dans la résidence principale, immobilier Duflot et/ou Pinel...), épargner pour la retraite (PERP pour tous, Madelin pour les professionnels, Prefon, Corem...).
La loi fiscale va logiquement multiplier les avantages fiscaux pour attirer les placements là où ils ne se dirigeraient pas spontanément. Les contribuables doivent donc savoir apprécier avec objectivité et sans passion la réalité des avantages qui leur sont proposés et leur impact réel. Certaines propositions sont intrinsèquement positives. Les autres dépendent de la situation fiscale. Il existe deux principales techniques d'incitation fiscale, à examiner avec soin en fonction de sa situation : réductions d’impôt (intéressantes uniquement pour ceux qui paient des impôts) ou crédits d’impôt qui sont restituables dans certains cas et intéressent alors ceux qui payent des impôts et ceux qui n’en payent pas.
Attention également à ne pas oublier l’application du plafonnement global des niches fiscales qui limite les économies d’impôt générées par la plupart de ces dispositifs à 10 000 €.

Donner
Donner peut permettre de déduire des charges de son revenu imposable. Il en est ainsi lorsqu'on verse une aide à des enfants ou petits-enfants dans le besoin, lorsqu'on loge des ascendants sans ressource ou lorsqu'on aide ses parents à financer leur hébergement en maison de retraite. Certains dons ne se déduisent pas du revenu imposable mais permettent de bénéficier d'une réduction d'impôt. Les dons accordés au profit d'organismes d'intérêt général ouvrent droit à une réduction d'impôt de 66 % du montant du don, dans la limite de 20 % des revenus imposables. La réduction s’établit à 75 % dans le cas de dons à des organismes fournissant des repas ou des soins aux plus démunis (Restos du cœur…).
Bonne déclaration